Il explose ses aquarelles à la Galerie Tabbal

NORIKIAN : « JE RESTE LE TEMOIN DE LA REALITE » Norikian propose aux amateurs d’art une quarantaine d’aquarelles. Sur les cimaises de la Galerie Tabbal, depuis le 20 novembre. Cet artiste subtil, sincère, à la limite du mysticisme, reste attentif à l’écoute de la condition humaine et du destin inéluctable. Profondément marquées par l’histoire de ses origines, blessées par le quotidien libanais ses œuvres sont un cri lancé, un pont jeté, un dialogue entre le spectateur et lui, une sorte d’accusation de cet environnement pathétique et tourmenté : «Je reste le témoin de la réalité» nous confie-t-il. Les traits caractéristiques de l’art chez le peintre sont rendus au moyens de compositions solides, excessivement structurées, de personnages situés, non pas dans une ambiance intemporelle, mais dans un milieu particulier qui est un univers de « visions-réalité ». Les tableaux sont empreints d’harmonie calme. Travaillées par touches légères, le choix des couleurs est surtout signe d’état d’âme ce qui confère à l’ensemble une vie intense. D’un lacis de traits de plume nerveux surgissent des personnages, toujours au premier plan, le fond sera élaboré selon l’humeur de l’artiste. Très étudié ou alors très épuré, animé par quelques touches estompées de bleu ou de terre de Sienne, qui suffisent à nous faire évoquer une certaine lumière, un certain ciel, et où le blanc crée de larges zones, telles d’infinies plages lumineuses. Rythme délicat des masses, touches caressantes, quel que soit le sujet choisi, la palette reste poétique. Maitrisant parfaitement l’art du pinceau, la matière fluide, transparente, nous rend une atmosphère toute particulière. La femme domine l’œuvre. Elle est le porte-parole de son époque. La lutte est là, inscrite sur ces visages qui s’interrogent, qui interrogent. S’insurgeant contre les actes qui bafouent la dignité de l’homme, femmes et enfants portent sur leur visage les stigmates d’un monde hostile. C’est en quoi Norikian se veut contestataire, accusateur. Si l’on admet que le portrait a pour ambition de pénétrer le fort intérieur, si l’on admet l’intensité de l’intériorité psychologique, alors nous ne pouvons qu’aimer ces êtres figés par une sorte de fatalité. On ne retrouve plus l’agressivité qui transcendait l’ensemble des compositions premières de Norikian mais une sorte de tendresse. Et malgré le marasme, l’espoir est là. Les teintes ses sont adoucies, diluées, comme libérées de profondes angoisses. L’artiste, même perplexe, retrouve un semblant de sérénité. Fruits d’une réflexion latente, d’un cheminement Intérieur, les personnages scrutent un horizon qui fuit. D’autres, dans des poses d’abandon, retrouvent un temps d’arrêt sur le chemin de l’exode. Il faut visiter cette exposition où les réminiscences originelles alliées à la réalité libanaise engendrent un chant profond.